Quillan, premier club professionnel de rugby à 15

 

Publié le 25/06/2007 à 09:41 par le quotidien « La Dépêche »

 

 

Le nom de Quillan doit avoir un rapport avec la cité des Trois-Quilles, ces trois pics qui surplombent la ville et que l’incontournable président Maugard a fait fixer sur l’écusson du club ; trois pics qui pourraient avoir un rapport avec les trois titres que Quillan a remportés dans les trois premières divisions… Une aventure unique, car Quillan fut le premier club en France, et sans doute au monde, à adopter le professionnalisme, 70 ans avant sa reconnaissance officielle par le Board. L’embauche factice des stars de Perpignan et d’ailleurs par le roi de la chapellerie fit la gloire de Quillan mais précipita le rugby français dans l’abîme : en effet, la guerre qui opposa le club de la Haute Vallée à l’USP et à Lézignan fut l’une des causes majeures de la rupture des relations décidée par les Britanniques en 1931.

Déjà, la diététique

À Quillan, les joueurs étaient accompagnés de la réputation de professionnels qui touchaient un salaire, s’entraînaient quatre fois par semaine sous la direction de Gilbert Brutus et sacrifiaient déjà à la diététique. Quillan se voulait une académie du beau jeu, un club de gentlemen portant l’élégant chapeau de laine Mérinos souple. Avec le décès du talonneur Rivière contre Perpignan en 1927, l’USQ avait d’ailleurs payé tribut au rugby de muerte. Le rugby quillanais a toujours été torrent ; il a été plusieurs fois puni par la justice fédérale pour les excès de joueurs ou de supporters.

 

Sous le règne de l’illustre président et maire Jean Bourrel, Quillan disputa trois finales d’affilée (1928-1929-1 930), plaça cinq des siens dans le XV de France de 1929 contre l’Allemagne et vit le président Gaston Doumergue en personne inaugurer le pont Suzanne, du prénom de la fille unique du chapelier.

US Quillan en 1931

 

Labourage et Bétaillère

Mais, après la finale de 1930 perdue devant Agen à l’ultime minute des prolongations, l’USQE fut dissoute et le Stade Quillanais ne put éviter le déclin. Jean Bourrel décéda en 1949 et sa veuve fit labourer le terrain jusqu’aux 22 mètres, jusqu’à ce qu’on trouve de la charbonille… Louis Gosse, grande figure du club qu’il continue de servir à 92 ans, rebâtit en 1942 ce que la guerre avait détruit. C’était le temps des déplacements en bétaillère, des matches à XIII ou à XV, indifféremment.

Les années 50 procurèrent à Quillan, qui avait connu l’opulence avec le chapeau, une nouvelle prospérité grâce au Formica, stratifié remplaçant le mica (en anglais, for mica). En 1952, l’usine anglaise s’installa dans les locaux de… la défunte chapellerie, sur la recommandation du président des XIII Paul Barrière, neveu de Jean Bourrel. PDG de Formica dont Ferrasse obtint plus tard la concession, Paul Mullot devint le nouveau Bourrel. Quillan, qui piétinait en 2e division, et Espéraza, qui venait de quitter la première, fusionnèrent en 1963, fulgurante réussite puisque la remontée dans l’élite et le titre couronnèrent la première saison ! L’USQE, dont le sigle eut plus longue vie que la fusion proprement dite, se maintint au sommet 14 ans.

La régression de Formica, qui resta cependant partenaire jusqu’à la fermeture de 2003, entraîna celle du club.

US Quillan Espéraza Champions de France en 1964

Mr Paul Mullot avec les Champions de France 1964

US Quillan Espéraza Champion de France deuxième Division 1964

Saisons basses en Haute Vallée de l’Aude

Paul Mullot abandonna la présidence en 1971 et Quillan ne lutta plus que pour le maintien. Passé en groupe B, Quillan quitta définitivement l’élite en 1978, à la suite d’incidents contre Arras. Après 27 années en 2e division, Quillan est descendu en 3e en 2005. En 1992, l’USQ a ajouté « Haute Vallée » à son sigle. En 2002, l’USQHV a célébré son centenaire et baptisé officiellement, enfin, le stade Jean-Bourrel. Le président Maugard, arrivé en 1975 de Belcaire pour s’installer comme kiné, tient la barre depuis 1982 – malgré de brèves éclipses- avec une passion inextinguible qui anime aussi ses plus proches lieutenants. Christian Maugard et ses fidèles se battent désormais pour que le premier club pro du monde soit le premier club non pro du Languedoc.